Association de Psychologues Cliniciens d'Orientation Freudienne

La pratique « libre » du psychologue malgré les contraintes « ciblées »

Dario MORALES

Qu’est-ce que le social ? Il s’agit d’un discours commun qui véhicule des solutions « prêt-à-porter », un savoir-faire offrant des ressources « normalisées », apportant des recours « standard » contre un réel qui s’écrit au singulier en fonction de chaque cas. Si l’on applique ces discours aux psychologues, quelle place, quel rôle et comment peut-il exercer librement son métier lorsque la demande est ciblée ? Il s’agit de rendre compte des modalités diverses de mise en œuvre des dispositifs de parole et de leur souci de collaboration avec les acteurs du soin.

Deux tables rondes auront lieu au cours de cet après-midi. Il s’agit de rendre compte des différentes façons dont le psychologue intervient et s’autorise dans les multiples lieux où il engage sa responsabilité auprès de ceux qui s’adressent à lui. Au sein de chaque institution, qu’elle soit soignante ou non (hôpital, aide aux victimes, structures sociales, etc.), il s’agit de penser, dans ces cadres divers, les variations de son exercice professionnel. Du coup, penser que le psychologue a sa place, c’est choisir d’en savoir quelque chose.

Malgré une présence importante du psychologue dans la diversité du champ médical et social, se pose la question de son rôle. La société véhicule des solutions « prêt-à-porter », un savoir-faire offrant des ressources « normalisées », apportant des recours « standard » et « ciblés » en faisant appel à des spécialistes de tel ou tel symptôme, ou à telle ou telle catégorie de population. Le psychologue clinicien, à vocation généraliste, prend note de ces demandes à la fois « multiples » et « ciblées ». Mais en même temps, il sait que ces variations laissent apparaître un mode d’intervention transversal, qui marque son style clinique. Le symptôme est à cet égard envisagé sur un double versant. L’efficacité de son acte ne se mesure pas uniquement à son intervention dans la résolution du symptôme, mais dans l’accompagnement à se repérer autrement dans la logique des choix et des actes, et donc dans l’usage que font les patients de leur symptôme, en tenant compte de la fonction de celui-ci dans leur économie psychique. La prise en compte des demandes toujours plus ciblées ne décourage pas le psychologue à vocation généraliste, car il sait que le réel de la maladie ou du trauma s’écrit au singulier. Au fond, tout discours à force d’être ciblé finit par produire un effet ségrégatif. Le psychologue clinicien, à l’inverse de l’approche collectiviste, au « tous pareils », propose le pari de la rencontre et de la prise en compte de la singularité, moyennant quoi le sujet qui peine à s’inscrire dans un lien social peut y prendre place, s’il en sait quelque chose et fait respecter son symptôme.